Nous avions initialement prévu de passer les fêtes de Noël dans les îles Néerlandaises ABC, mais finalement étant données les faibles possibilités de déplacement sans voiture, le nombre de plage ou aires de jeux limité depuis le mouillage de Curaçao et la réputation de l’île Aruba pour ses boîtes de nuit, nous avons décidé de ne pas nous arrêter à cette dernière île et de partir avant Noël pour la Jamaïque.
Nous quittons Spanish Waters en fin de journée pour 3 jours et demi de navigation.
Comme je ne voulais surtout pas être en mer pour Noël et que la météo était clémente en cette fin de semaine, nous avons levé l’ancre le 17 décembre juste avant la tombée de la nuit pour nous lancer dans notre première grande navigation de plusieurs jours! C’est donc avec un peu d’émotion et une pointe d’angoisse pour moi que nous avons quitté l’île de Curaçao. Les filles étaient plutôt impatientes de faire cette traversée et avaient participé à sa préparation en m’aidant à cuisiner quelques gâteaux, cakes et pancakes pour la route.
Le départ est marqué par une mer calme, puisque nous sommes protégés des vagues pendant encore quelques heures par la côte, et surtout par les nombreux cargos qui partent et arrivent de Curaçao et Aruba. Nous serons obligés de dévier notre route deux fois pour passer suffisamment loin de ces énormes bâtiments. J’avoue que je m’en remets à Stéphane pour ce genre de décision, car ce n’est en fait pas évident d’anticiper sur leur trajectoire. Nous nous aidons de leurs feux de navigation (rouge bâbord et vert tribord) pour deviner leur direction…
La nuit, nous avons souvent des poissons volants qui atterrissent sur le bateau. La plupart du temps nous les découvrons un peu tard mais celui là a eu un peu plus de chance, il a pu reprendre son vol!
Comme lors de nos précédentes navigations de nuit, je prends le premier quart à 22h et nous nous voilà partis pour une succession de relais toutes les 2 heures! Nous voyons le vent et les vagues monter en milieu de nuit dès que nous dépassons la côte de Curaçao. Le vent s’établit à 20-23 nœuds et reste ensuite stable. Nous occupons nos quarts à surveiller les cargos (un tour d’horizon au moins toutes les 15 minutes est indispensable!), le vent, et regarder les étoiles. Nous avons bien conscience que ces moments sont uniques et inoubliables, que nous pouvons faire le plein d’étoiles filantes! Quand Stéphane vient me relayer et que je vais m’allonger dans la cabine, je réalise à quel point le bateau est malmené en navigation. Que de craquements, crissements, et secousses! Depuis que nous ne sommes plus abrités par Curacao, les vagues de 2 à 3m claquent en plein travers sur la structure du catamaran dont nous sentons les floteurs se prendre des chocs monumentaux et dans les cabines nous pouvons presque les sentir se déformer sous ces coups de boutoir! Un catamaran prend les vagues très différemment qu’un monocoque. Il est certes plus stable si les vagues viennent du devant ou de l’arrière mais au travers, le mouvement du bateau est beaucoup moins naturel que sur un monocoque car la vague soulève alternativement une coque puis l’autre et fait faire au bateau une sorte de décollage / atterrissage d’un bon mètre d’amplitude sur quelques secondes. Nous nous habituons finalement à ces mouvements et à ces bruits car il faut faire confiance au bateau et essayer de dormir! Les filles préfèreront dormir ensemble dans le carré. J’ai la chance de profiter du quart qui voit l’aube se lever. Pauline est déjà réveillée et vient profiter du spectacle. Pas de nuage à l’horizon, nous pouvons admirer le halo rose qui annonce l’arrivée su soleil et voir ce dernier apparaître dans toute sa splendeur…
Malheureusement le premier matin, le lever des enfants est moins sympathique car accompagné du mal de mer que nous avions pu éviter jusqu’à présent… Nous nous rendons à l’évidence: le lait au chocolat sera à éviter pour les prochains jours pour Lucie et Baptiste, les enfants n’ont qu’à manger ce qu’ils veulent, quand ils veulent! Pauline dévore alors des crackers et du jambon pendant toute la journée, tandis que Lucie a une préférence pour le pain avec du beurre. Baptiste mange un peu plus de tout. Après avoir pris cette décision, les enfants vont beaucoup mieux et le mal de mer s’estompe au cours de la matinée. Les vagues sont cependant assez grosses (au moins 3 mètres de creux) et il est difficile pour eux de lire, dessiner ou jouer. Pour cette première journée, ils auront le droit à beaucoup de dessins animés, merci Tintin et Disney! Cette super baby sitter nous est d’une grande aide, car pour ma part, je ne suis vraiment pas en forme, et je n’arrive pas à avaler grand chose (je commence à me demander pourquoi j’ai passé du temps à nous préparer des petits plats à l’avance puisque même une pomme ne passe pas!)… Et puis nous continuons les quarts sur le même rythme que la journée, pour tâcher de récupérer de notre nuit hachée… Stéphane en profite quand même pour pécher, et bien lui en a pris , car il nous rapporte deux daurades coryphènes (moins impressionnantes que sa première prise quand même!) et notre premier thon! Mais j’avoue mon estomac n’a pas très envie de sashimis!
Notre premier thon: 3,5kg
La nuit tombe sur un bon grain qui nous refroidit et finit de nous fatiguer… Nous avons bien réduit les voiles et la bateau avance malgré tout très bien. Nous filons maintenant à plus de 8 noeuds et nous avons pris 2 ris dans la Grand Voile et avons enroulé presque la moitié du génois! Nous allons très vite avec la moitié de surface de voile disponible! Stéphane est réveillé en pleine nuit par un grand fracas: une vague plus grosse que les autres a ouvert le placard dans lequel la vaisselle est rangée, et l’en a fait sortir! Résultat des courses: au moins 5 assiettes, 2 pots de yaourt, et 1 verre en mille morceaux en bas de l’escalier! En dehors de cette mauvaise surprise, la nuit sera calme, sans grain, et nous pourrons à nouveau profiter des étoiles.
Cette deuxième journée va être un peu plus facile: en milieu de journée, le vent tombe un peu et s’établit plutôt vers 18 nœuds. La mer est surtout plus calme, et avec l’aide de mes bracelets Sea Band, du Motilium et de Mercalm, mon mal de mer finit par passer. J’arrive à faire honneur au gâteau au chocolat de Lucie pour le goûter! Les enfants passent une après midi calme, entre siestes, jeux et lectures. La nuit se passe à l’image de la journée, tranquillement…
La vie s’organise en navigation et Pauline se brosse maintenant les dents par le hublot du carré! Pourquoi pas 😉
Cette troisième journée voit le vent tomber. Cela nous arrange bien car la bateau est finalement allé trop vite et nous ne pouvons pas arriver plus tôt que prévu, en pleine nuit. La journée se passe donc tranquillement, sur une mer très calme. En fin de journée, nous rentrons dans le canal entre la Jamaïque et Haïti. Si on m’avait dit que je me retrouverais un jour à cet endroit en bateau, je n’y aurais pas cru! D’ailleurs, jusqu’il y a peu de temps je ne savais même pas que la côte d’Haïti faisait face à celle de Jamaïque… La nuit se poursuit calmement. On ne croise finalement très peu de cargos, nous avons dépassé le port de Kingston un peu plus tôt. Stéphane a réajusté la route pour que l’on n’arrive pas trop tôt.
J’ai l’impression que le soleil met plus de temps que d’habitude à se lever! Vers 8h00, nous mettons en route le moteur car il n’y a vraiment plus de vent. Nous voyons maintenant bien la côte Jamaïcaine, enfin!! L’entrée dans le port est bien balisée, heureusement car le passage est très étroit. La fin du voyage est un peu bousculée par un petit détail qui peut avoir son importance sachant tous les contrôles sanitaires qu’il y a à l’arrivée. En effet, nous réalisons qu’une brique de lait stockée sous la couchette de Baptiste s’est percée et vidée à moitié. Il en ressort une odeur nauséabonde qui ne peut passer inaperçu! Nous devons tout vider, nettoyer à l’eau de Javel, faire sécher le fond de la cale, ainsi que tout ce qui était stocké à côté. Et évidemment, une bonne pluie se met en même temps à tomber! Nous en venons à bout juste au moment où nous arrivons devant la marina. Quelqu’un nous fait signe de nous amarrer au ponton, passage obligatoire pour le passage sur le bateau d’un certain nombre de personnes: contrôle sanitaire, clearance, immigration etc…
Nous savourons un bon plat de pâtes à l’arrivée! Et tournée de daurade coryphène à la poêle pour les grands!
En tout cas, ce premier mouillage en Jamaïque promet d’être très sympa car nous mouillons pour la première fois dans une marina et pouvons profiter des douches, du wifi et de la piscine!! Nous sommes très heureux d’être arrivés, d’être venus à bout de cette traversée (certes modeste, mais c’était notre première!), et de pouvoir maintenant profiter de notre nouvelle escale où nous allons passer Noël!
Et finalement cette transcaraibes, c’était pas la mer à boire 😉
6 comments
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Claudine Diérick
23 décembre 2014 à 8 h 24 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
Merci Anne, c’est comme si on y était, le mal de mer en moins ! (…)
Maintenant: détente et repos bien mérités.
25 décembre en Jamaïque: messe de minuit en Reggae ?…
Joyeux Noël à vous 5,
affectueuses grosses bises !
zaza
23 décembre 2014 à 9 h 29 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
Coucou les zamis !!
Quelle épopée et Anne, je t’admire. Tu t’es super bien adaptée
Merci pour ce récit qui nous fait partager des moments exceptionnels et préparez bien Noël.
Gros bisous
Gallet Marielle
23 décembre 2014 à 13 h 14 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
Quelle aventure pour la famille! qu’aurons -nous , pauvres terriens , à proposer de merveilleux à ces navigateurs à la belle mine et aux yeux pleins de rêves! Bon Noël en ces terres lointaines .Bises
Ann
25 décembre 2014 à 14 h 26 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
» noel, joyeux noel, bons baisers de Jamaïque, … ».
On espère que le père noel à bien trouve ysun et que les cadeaux n’ont pas coulé !.
On pense à vous en cette journée particulière. Gros bisous. Luca & Alicia
Sarah
27 décembre 2014 à 1 h 09 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
Merci pour ce recit, comme si on y était…. Et bravo car je n’aurais pas été rassurée a ta place. Et le capitaine ? Il était vraiment détendu ou il faisait semblant ? Grosses bises et bonnes fins de fêtes !
Cathy Philippe
27 décembre 2014 à 18 h 07 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
Un petit coucou,
Nous sommes émerveillés par les aventures que vous vivez et les paysages que vous approchez. Votre site est super et nous le partageons avec les amis.
Gros bisous à toute la petite famille
Cathy et Philippe